Depuis le début du printemps, Un enterrement à Ornans (1849-50) de Gustave Courbet révèle ses secrets aux visiteurs du Musée d’Orsay. Restauré au cœur des collections de l’institution, le chef-d’œuvre se prête au jeu des regards curieux.

Jusqu’au mois de septembre, les équipes de restauration du Musée d’Orsay s’attellent à redonner tout son éclat à l’Enterrement à Ornans de Courbet. Tous les jeudis matin, d’ailleurs, les visiteurs pourront poser des questions aux spécialistes et profiter de leur savoir pour découvrir les secrets du tableau. Les curieux doivent réserver leur créneau en amont sur le site du musée, mais les découvertes qu’ils peuvent faire à travers cette expérience sont, quant à elles, illimitées. En effet, cette création unique du maître est « un jalon de l’histoire de l’art, du musée d’Orsay et de l’œuvre de Gustave Courbet » selon Sylvain Amic, président de l’institution.
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Un enterrement à Ornans est restauré dans l’allée des sculptures du musée, près des Romains de la Décadence (1847) de Thomas Couture. Le travail de restauration vise à améliorer la lisibilité de l’œuvre et consolider son support. Depuis sa présentation à l’Exposition Universelle de 1855, elle fut revernie en 1984, retouchée dans les années 1930, retendue à la fin des années 1890 et rehaussée par un nouveau châssis en 1884. Dès sa réalisation, d’ailleurs, Gustave Courbet était conscient de la fragilité du tableau et a refusé de la prêter plusieurs fois. Cependant, les nombreuses altérations qu’elle a reçu à travers les décennies révèlent aujourd’hui son surprenant parcours.
Une œuvre de Courbet maintes fois altérée
La restauration actuelle de l’œuvre par le Musée d’Orsay permet de dévoiler ses secrets. En outre, les spécialistes en ont identifié une impressionnante au niveau des représentants du clergé, à gauche du tableau. A l’origine, le prêtre mis en avant était Benjamin Bonnet (1801-1865), qui a ensuite été déplacé d’une trentaine de centimètres vers la droite de la composition, puis remplacé par le porte-croix François-Félicien Colard-Claudame (1810-1867). Dans une correspondance à ses amis Marie et Francis Wey, en 1849, Gustave Courbet déclarait d’ailleurs : « J’ai non seulement obtenu du curé des habits d’enterrement, mais je l’ai encore décidé à poser, ainsi que son vicaire. J’ai eu avec lui, des conversations morales et philosophiques vraiment désopilantes. » Il se plaint également d’avoir dû inclure des sacristains dans sa toile, afin de ne pas les irriter.
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De même, l’équipe de restauration a remarqué des altérations au niveau du cercueil, qui aurait peut-être visé à le mettre en valeur. « J’y reviendrai dans un texte plus long, car ce point mérite un argumentaire précis. Mon hypothèse – et j’insiste sur le terme – est que Courbet aurait voulu diminuer l’importance du prêtre dans le tableau. Il y a là un petit côté anticlérical, qui reste encore à prouver », détaille Bruno Mottin, conservateur honoraire et spécialiste des techniques de peinture au C2RMF. Selon lui, les porteurs de bière, au centre du tableau, et le groupe de femmes, à droite, auraient connu de nombreuses modifications et hésitations de la part du peintre.
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