Les chats, de divinités à icônes pop

Du cœur de l’Egypte ancienne aux écrans de nos smartphones, les chats ont toujours fasciné l’humanité et inspiré les artistes.

Le doyen de l'université féline, Louis Wain
Le doyen de l’université féline, Louis Wain

Du salon bourgeois aux mythologies ancestrales, le chat a toujours occupé une place à part dans l’imaginaire humain. Son allure à la fois familière et mystérieuse en fait un sujet de prédilection pour les artistes. Ses représentations, multiples et variés, témoignent de l’évolution des sensibilités esthétiques et des croyances au fil des siècles. Qu’il soit divinité protectrice, démon malicieux ou simple compagnon de jeu, le chat est une source inépuisable d’inspiration.

– 2000 ans avant notre ère – Egypte ancienne

Une créature sacrée : Les chats étaient vénérés, domestiqués et parés des rôles de gardiens, guides spirituels et protecteurs de l’âme du défunt. Ils étaient le symbole de la féminité et de la lumière divine.

Bastet et Ré : Associés à ces divinités, ils incarnaient la protection contre les forces du mal et étaient traités avec les mêmes honneurs que les humains. Ils étaient ainsi momifiés.

La figure du chat apparaît également sur des statuettes en faïence, des amulettes, des alabastres, mais aussi sur des stèles et des fresques funéraires, située sous la chaise de son ou sa maîtresse, soulignant leur rôle protecteur dans l’au-delà.

Momies de chats dévoilés dans la nécropole de Saqquarah © Khaled Desouki/AFP
Momies de chats dévoilés dans la nécropole de Saqquarah © Khaled Desouki/AFP
Tombe de Nebamon : scène de chasse et de pêche, Nouvel Empire, XVIIIème dynastie, British Museum
Tombe de Nebamon : scène de chasse et de pêche, Nouvel Empire, XVIIIème dynastie, British Museum

Vème – XVème siècle – Moyen-Âge

Symbole du mal : La mauvaise réputation des chats, conjointement à celles des femmes, se retrouve au Moyen-Âge, avec le triste sort réservé aux sorcières, accusées d’être responsables de tous les maux, comme de propager la peste noire.

Vers 1210 : Le chat apparaît dans plusieurs bestiaires médiévaux qu’ils soient religieux ou sataniques. Dans le célèbre Bestiaire d’Ashmole, le chat est décrit comme indépendant et traître, des qualités jugées incompatibles avec l’imaginaire chrétien de l’époque qui prône la soumission à Dieu.

1233 : Le pape Grégoire IX dans une bulle papale, Vox in Rama, fait de lui le symbole de Satan, du monde occulte, le propagateur de la Peste et le fidèle familier des sorcières, voire la sorcière elle-même. Le chat noir, tout particulièrement, est destiné au bûcher.

Le Bestiaire Ashmole, Angleterre 1201-1225 (Bibliothèque Bodléienne, MS. Ashmole 1511, fol. 35v)
Le Bestiaire Ashmole, Angleterre 1201-1225 (Bibliothèque Bodléienne, MS. Ashmole 1511, fol. 35v)

XIVème – XVIème siècle – Renaissance

La Renaissance du chat : La pensée humaniste et l’émergence des sciences naturelles incitent les artistes à porter un regard neuf sur le monde animal. Le félin est désormais perçu comme une créature fascinante dotée d’une grâce et d’une intelligence remarquables.

1513-1516 : Léonard de Vinci, par exemple, s’intéresse de près à l’anatomie du chat et réalise de nombreuses études.

1562-1563 : Véronèse dans les Noces de Cana conservé au musée du Louvre place un chat joueur au premier plan se rapprochant alors d’une représentation picturale plus réaliste de l’animal.

Etude du mouvement des chats, Léonard de Vinci, 1513-1516, dessin plume et encre avec lavis de craie blanche, 27x21 cm, Royal Collection, château de Windsor (Royaume-Uni)
Etude du mouvement des chats, Léonard de Vinci, 1513-1516, dessin plume et encre avec lavis de craie blanche, 27×21 cm, Royal Collection, château de Windsor (Royaume-Uni)

XVIIème siècle – XIXème siècle – Période moderne

Le chat, compagnon élégant : Le chat s’invite dans les salons bourgeois et devient un sujet de prédilection pour les peintres de natures mortes et scènes de genre.

Les portraits de jeunes filles tenant des chats dans leurs bras fleurissent. Usant de lignes courbes sur les silhouettes et de tons claires et rosés, Renoir, dans L’Enfant au chat, associe la douceur de l’enfant à celle du félin.

Le chat symbolise la tendresse et l’innocence, mais aussi une subtile à la revendication de liberté et d’indépendance féminine. Manet, dans Olympia, utilise le chat noir comme un symbole de sensualité et de provocation.

La popularité du chat à cette époque va encore plus loin lorsque des artistes parviennent à le placer au rang de sujet unique et principal de compositions artistiques. La peintre Henriette Ronner-Knip consacre de nombreuses toiles aux chats, les représentant avec réalisme et émotion. Son tableau Contentement illustre parfaitement cette tendance.

Henriette Ronner Knip, 
Contentement, 
1900, 
Huile sur toile
Henriette Ronner Knip, Contentement, 1900, Huile sur toile

XXème siècle – Ere contemporaine

Icône populaire et ambiguë : Le chat devient un caméléon culturel. Il est représenté de multiples façons, reprenant les symboliques anciennes et en créant de nouvelles. Le chat noir revient en force, associé à la sorcellerie et au mystère. Rackham, dans Le jour où elle s’est transformée en chat, le dépeint de manière frontale et hiératique.

Le chat s’invite dans tous les médias : livres pour enfants, films, affiches. Il devient une icône populaire, oscillant entre le bien et le mal.

Le chat a largement marqué l’histoire de l’animation et du cinéma. Des personnages emblématiques comme Salem, le chat noir sarcastique de Sabrina, ou Patterdon, le compagnon fidèle d’Hermione, ont marqué les esprits. Le Chat Potté, quant à lui, incarne l’esprit aventureux et malicieux du félin, tout en explorant la dualité du bien et du mal.

Mais celui dont des générations se souviennent reste Tom de Tom et Jerry, créé en 1940, qui poursuit sans relâche la souris Jerry devenant l’emblème du slapstick, genre cinématographique humoristique basé sur des actions physiques très exagérées, parfois absurdes et des gags visuels.

om et Jerry, duo iconique, a popularisé les gags visuels et physiques autour du chat et de la souris. Chez Disney, les chats oscillent entre le rôle de méchant (Lucifer, Si et Am) et celui de héros (Duchesse, Thomas O’Malley). Ces représentations contrastées renforcent l’ambivalence du chat dans l’imaginaire collectif.

L’animation a fait du chat un personnage complexe, tantôt compagnon fidèle, tantôt figure maléfique. Cette dualité reflète l’ambivalence culturelle autour du félin, oscillant entre l’affection et la méfiance.

XXIème siècle

Au XXIe siècle, le chat s’invite pleinement dans l’ère numérique. Les nouvelles technologies offrent de nouvelles possibilités créatives et le félin en profite. L’art numérique, le street art et les réseaux sociaux en font un motif récurrent.

Des artistes comme Endre Penovác réinventent le portrait du chat à travers des techniques innovantes, mêlant tradition et modernité. Le street art, avec des figures comme M. Chat, transforme l’espace urbain en galerie d’art féline.


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