Empêtré dans une affaire de vols, le British Museum a licencié son conservateur en chef de l’art grec et romain, soupçonné d’avoir vendu les objets sur eBay, au fil des années.
Selon une enquête interne menée par le British Museum et révélée par le Daily Telegraph, le conservateur en chef de l’art grec et romain, Peter Higgs, est soupçonné d’avoir volé et vendu sur eBay plus de 1 500 objets de la collection du musée. Ces artefacts ont souvent été vendu pour une fraction de leur valeur réelle. Par exemple, un objet romain, datant de plus de deux millénaires et estimé à 50 000 livres sterling (58 000 €), aurait été vendu 40 livres sterling (30 €) sur le site de commerce en ligne.
Peter Higgs, qui a travaillé comme conservateur au British Museum pendant 30 ans, a été licencié en début d’année, après que le musée a découvert la disparition de nombreux objets, dont des bijoux en or et des pierres précieuses et semi-précieuses. Selon le Daily Telegraph, le nombre d’objets prétendument volés par le conservateur serait en réalité « plus proche de 2 000 », pour une valeur estimée à plusieurs dizaines de millions de livres sterling.
L’enquête interne a révélé que Peter Higgs opérait sous le pseudonyme « sultan1966 » sur eBay, depuis 2016. Il a été identifié après qu’un utilisateur a trouvé son compte Paypal lié à son fil Twitter, sur lequel il avait mentionné son vrai nom et poste au musée. L’identification a été permise lorsque Peter Higgs a tenté de vendre des objets de la collection qui avaient été correctement catalogués, ce qui signifie qu’ils étaient traçables dans l’inventaire.
Le British Museum se trouve désormais confronté à la tâche complexe de déterminer exactement quels objets ont disparu de sa collection. La police devra obtenir des registres d’eBay et d’autres sites d’enchères pour vérifier les détails de toutes les ventes réalisées ou tentées par Peter Higgs. Les acheteurs des objets devront également être contactés. « Si des acheteurs sont basés en dehors de la Grande-Bretagne, cela pourrait entraver les enquêtes », précise la police britannique.
Dès 2021, les responsables du British Museum avaient été alertés de la possibilité d’un voleur parmi leurs employés. Un marchand de pierres précieuses anciennes, basé au Danemark, a contacté le musée pour signaler la vente de trois pierres précieuses provenant de la collection du musée sur eBay. Selon la correspondance consultée par BBC News entre le marchand d’art et le musée, le directeur adjoint Jonathan Williams a répondu en juillet 2021 que « les objets concernés sont tous comptabilisés et sans aucune suggestion d’acte répréhensible de la part d’un membre du personnel du musée ». Il a ajouté qu’il y avait eu une « enquête approfondie » et que la « collection était protégée ».
De nombreux experts estiment que le British Museum aurait dû agir plus rapidement et impliquer la police dès qu’il a été informé des vols présumés. « Pour être honnête, c’est assez choquant », a déclaré Christopher Marinello, PDG du cabinet d’avocats Art Recovery Internation, au Guardian. « Nous recevons chaque jour des rapports de vols de musées du monde entier. Mais c’est le British Museum, l’un des musées les plus importants et les mieux financés au monde. »
Cette nouvelle intervient quelques semaines seulement après que le directeur du musée depuis huit ans, Hartwig Fischer, a brusquement annoncé qu’il quittera son poste l’année prochaine. Pour le moment, la police n’a procédé à aucune arrestation.
La réputation ternie du British Museum
Pointé du doigt pour ses failles sécuritaires, critiqué pour n’avoir pas pris au sérieux les avertissements, l’aveu d’inaction prolongée du British Museum apparaît pour ses détracteurs comme le symptôme d’une arrogance récemment illustrée par les débats sur les restitutions des marbres du Parthénon et des bronzes de Bénin.
Argumentant contre les demandes en restitution des artefacts pillés par les Britanniques, la direction du musée a toujours soutenu que ses collections étaient conservées et protégées de manière exemplaire.
La Museums Association s’est saisie de ces rebondissements pour publier une déclaration, indiquant que si les vols commis par des employés étaient selon eux « incroyablement rares » – affirmation contestée par une partie de la communauté des enquêteurs en trafic d’antiquités, « le sous-financement systémique du secteur au cours des dix dernières années » impacte la bonne mise en place de mesures de sécurité et de procédures d’enquête internes.
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