Alors que la France maintient une TVA à 5.5 % pour ses opérations artistiques, la Belgique pourrait faire face à une augmentation drastique de la fiscalité sur le marché de l’art. En cause, la « directive taux » 2022/542 de l’Union européenne, qui impose aux États membres de réformer leur système de TVA d’ici le 1er janvier 2025.
Le marché de l’art est un secteur économique et culturel stratégique pour la Belgique, qui se distingue par sa diversité, sa créativité et son dynamisme. Selon le rapport Artprice 2023, la Belgique est classée 11ème au niveau mondial et 5ème dans l’UE pour le marché de l’art contemporain. Elle est également un carrefour du marché des biens culturels africains, attirant de nombreux collectionneurs internationaux.
L’un des atouts du pays est sa fiscalité avantageuse, qui favorise les transactions artistiques. Actuellement, lorsqu’un marchand achète une œuvre à un taux de TVA réduit (6 % en Belgique), il peut ensuite la revendre en appliquant le régime de la marge. Mais ce régime fiscal pourrait être menacé et subir une hausse drastique. En cause, la « directive taux » 2022/542 de l’Union européenne, qui impose aux États membres de réformer leur système de TVA d’ici le 1er janvier 2025. En effet, l’avocat bruxellois Yves-Bernard Debie, expert du marché de l’art, a rapporté aux Echos que les discussions autour du projet de loi du SPF Finances envisagerait de supprimer ce régime et d’imposer une TVA de 21 % sur le montant total de la revente.
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Si ces réformes étaient adoptées, elles auraient des effets désastreux pour les marchands d’art belges, qui verraient leur compétitivité et leur rentabilité diminuer. Ils devraient payer une TVA plus élevée, qui réduirait leur marge, souvent inférieure à 10 %. Ils seraient également désavantagés par rapport à leurs concurrents des pays voisins, qui bénéficient de taux réduits. Par exemple, la France maintient une TVA à 5.5 % pour ses opérations artistiques.
« La concurrence avec des pays voisins sera déloyale, entraînant un risque indéniable de délocalisation », craint Patrick Mestdagh, président de la Chambre Royale des Antiquaires et des Négociants en Œuvres d’Art de Belgique (ROCAD), auprès du Quotidien de l’art. Plusieurs études d’incidences, notamment réalisées par la ROCAD, démontrent que l’instauration d’un taux global de 21 % affaiblirait la position internationale du marché belge et mettra en danger des milliers d’emplois directs ou indirects.
Les collectionneurs d’art seraient également pénalisés par ces réformes, qui augmenteraient le coût d’acquisition des œuvres. Yves-Bernard Debie dénonce dans Le Quotidien de l’art des réformes qui ignorent la globalité du marché : « Les marchands et les collectionneurs importants sont internationaux, ils ne sont plus les sujets captifs d’un État et de sa fiscalité. Les grandes transactions en importance ou en volume pourront être réalisées sous des cieux plus propices. »
Ainsi, les collectionneurs belges seraient tentés d’acheter à l’étranger des œuvres d’artistes belges en profitant de taux allégés chez leurs voisins. Ce phénomène de dumping fiscal nuirait au patrimoine culturel belge, qui se verrait privé de ses chefs-d’œuvre.
Les collectionneurs modestes, qui effectuent des achats autour de 1 500 euros, seraient également touchés par ces réformes, qui rendraient l’art moins accessible. Le régime de la marge, qui leur permet de payer une TVA légère, serait supprimé au profit d’un taux plein, qui frapperait durement leur budget. Ils n’auraient pas les moyens de « faire leur marché » ailleurs, et seraient donc découragés d’acheter de l’art.
Au lieu d’augmenter ses recettes, l’Etat les diminuerait rapidement. « Avoir une fiscalité attractive est la promesse d’une économie prospère et compétitive, c’est en d’autres termes s’assurer d’accroître ses finances publiques », conclu le journaliste Léopold Vassy dans le Quotidien de l’art.
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