A la fin du mois de décembre, l’association parisienne Lumière sur le patrimoine a déposé une plainte contre trois musées américains concernant six vitraux de la cathédrale de Rouen. Le président de l’association, Philippe Machicote, affirme avoir « la preuve que [les panneaux] ont été volés dans les années 1920 ». Ces vitraux du XIIIe siècle sont actuellement exposés au MET (Metropolitan Museum of Art), au Glencairn Museum et au Worcester Art Museum.
« Cette histoire est connue, y compris du Metropolitan, qui la mentionne dans deux catalogues sur ses collections d’art médiéval et sur la collection de Raymond Pitcairn », affirmait Philippe Machicote au média Ouest France au début du mois de janvier. Le président de l’association Lumière sur le patrimoine s’appuie notamment sur un article de l’historien de l’art et archéologue Jean Laffont (1888-1975) pour corroborer cette accusation.
En 1972, M. Laffont avait effectivement rédigé un article pour le bulletin de la Société nationale des antiquaires de France, à propos de six vitraux de la cathédrale de Rouen qu’il avait répertorié en 1911. « Cette année-là, le dépôt était encore riche de morceaux remarquables des XIIIe, XIVe et XVIe siècles. J’obtins que les vitraux fussent placés dans des caisses neuves. Je pensais les avoir sauvés mais, lorsqu’on ouvrit les caisses en 1931, pour une exposition d’art religieux ancien, on n’y trouva guère que des panneaux en lambeaux, de simples débris, quelques bordures et… des pierres », décrivait l’historien de l’art dans l’article. Dans les années 1920, cinq des six panneaux auraient malheureusement été vendus à des collectionneurs américains. Le dernier, quant à lui, fut acquis par le Metropolitan Museum of Art en 1980.
Les six vitraux représentant la Légende des Sept dormants d’Ephèse et Saint Pierre prêchant sont actuellement exposés au MET, à New York, au Worcester Art Museum, dans le Massachusetts, et au Glencairn Museum, en Pennsylvanie. Ces six panneaux, considérés comme des « trésors inaliénables », décoraient autrefois la cathédrale de Rouen. « Il faut impérativement qu’ils soient restitués à la France, puisque les cathédrales sont la propriété de l’État. Ces vitraux, collections publiques, sont inaliénables », assurait Philippe Machicote.
Des mesures de restitution prises par les musées
En 2023, le directeur du Metropolitan Museum of Art de New York, Max Hollein, expliquait que le musée souhaitait effectuer de nouvelles recherches concernant la provenance de ses collections. Un comité de dix-huit conservateurs a d’ailleurs été chargé de ce projet, afin de « reconsidérer les responsabilités du MET » concernant les œuvres d’art qu’il abrite. « Nous ne voulons pas avoir dans nos collections le moindre objet qui nous soit parvenu de manière illégale, et il y a des cas où nous ne sommes pas les bons propriétaires », expliquait Max Hollein dans un communiqué. Cependant, le musée n’a pas encore réagi à la plainte récemment déposée par Lumière sur le patrimoine.
De son côté, le Worcester Art Museum a publié un communiqué dans le journal Boston Globe, indiquant que « si nous recevions des informations (sur le panneau acquis en vente publique en 1921) ou une plainte, nous l’étudierions avec attention ». La publication précise que cette institution du Massachusetts prend ce genre de plainte « très au sérieux » et compte suivre des règles éthiques.
A la suite de la plainte déposée par Philippe Machicote, le parquet de Rouen dispose de deux mois pour rendre sa décision. Le directeur de l’association, quant à lui, assure qu’il « ne lâchera pas », qu’elle que soit cette décision. Il espère également que le ministère de la culture se saisisse rapidement du dossier pour l’appuyer.
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