En octobre dernier, quatre séismes d’une magnitude de 6,3 ont frappé la région occidentale de l’Afghanistan. Ces tremblements de terre ont tué plus de 1500 personnes et en ont blessé des milliers d’autres. Dans le même temps, une dizaine de villages ont été entièrement détruits et de nombreux sites culturels et historiques ont subi les secousses de cette catastrophe.
Lorsque les premiers séismes ont frappé la région, Jalil Rayan, un chef de projet à l’ACHCO (Organisation Consultative pour le Patrimoine Culturel Afghan) travaillait au renforcement d’une synagogue à Hérat. Ces travaux de restauration sur le bâtiment l’ont d’ailleurs sauvé de nouvelles détériorations dues aux tremblements de terre. Cependant, nombre d’autres monuments et sites historiques ont été partiellement ou entièrement détruits par la catastrophe.
A l’ouest du pays, les districts d’Injil et de Zinda Jan témoignent des plus graves dommages liés aux séismes. Selon Arash Boostani, un chef de projet pour l’AKTC (un organisme qui œuvre à la protection de la culture en Afghanistan), la plupart des villages de ces secteurs ont été entièrement détruits. Malheureusement, certains d’entre eux abritaient des structures datant de la dynastie Safavide (du XVIe au XVIIIe siècle) et de la dynastie Ilkhanate (du XIIIe au XIVe siècle). « Dans cette région, il y avait des moulins à vent vieux d’environ six cents ans… il s’agissait de moulins à vent verticaux, uniques en leur genre. […] Je pense que l’économie de cette région en sera lourdement affectée. Nous devrons voir si les générations futures seront prêtes à repartir de zéro, » témoignait-il à The Art Newspaper.
De même, la ville d’Herat, qui compte parmi les sites historiques de l’Unesco depuis 2004, a beaucoup souffert des quatre tremblements de terre. Les principaux monuments de la cité sont tous fortement endommagés par les secousses. Parmi eux, la citadelle d’Ikhtyaruddin, construite en 330 avant notre ère, est désormais marquée par de nombreuses fissures. L’une de ses tours s’est même complètement effondrée à la suite de la catastrophe. De son côté, la mosquée Masjid-i Jami, construite au XIIIe siècle, présente aujourd’hui d’importants dégâts. Ses façades sont également fissurées et certains de ses minarets se sont effondrés. Heureusement, l’un des conseillers de l’ACHCO, Jolyon Leslie, estime que les éléments d’origine de la mosquée ne sont pas atteints. Cependant, son intégrité structurelle doit désormais être évaluée par les experts. « La grande mosquée a été restaurée tout au long de son histoire, et une grande partie de ce qui est visible aujourd’hui est le fruit de restaurations bien intentionnées du XXe siècle. Mais en tant que symbole d’Herat, c’est une structure incroyablement importante », expliquait-il à The Art Newspaper.
Au nord de la ville d’Herat, le célèbre complexe de Musalla (XVe siècle), reconnu comme le plus grand ensemble architectural de la région, a été préservé de graves dommages par une récente initiative de l’AKTC. Cependant, plusieurs briques et tuiles du minaret d’Hussein Bayqara ont été endommagées par les secousses. « Ce minaret, qui témoigne de l’histoire timuride des Afghans, est encore debout. C’est un très petit gain dans le contexte plus large de cette catastrophe. Mais cela reste, néanmoins, un point positif », affirme Ajmal Maiwandi, le directeur général de l’AKTC.
Une catastrophe dont l’ampleur reste à mesurer
Depuis la fin du mois d’octobre, les équipes de l’AKTC travaillent en étroite collaboration avec le département des monuments historiques Afghan et le ministère de l’information et de la culture. Malgré l’ampleur encore inimaginable des dégâts, ils œuvrent à évaluer chaque site de la région et à déterminer l’étendue des dommages causés aux structures historiques et culturelles.
Malheureusement, les dégâts causés par ces quatre séismes meurtriers semblent dépasser les capacités financières du gouvernement taliban. L’Afghanistan a reçu plusieurs aides de pays voisins tels que la Turquie, l’Iran et les Emirats Arabes Unis, mais cela ne suffira sans doute pas à initier tous les chantiers de restauration nécessaires pour les différents sites impactés par la catastrophe.
Interrogé par The Art Newspaper, le directeur de l’information et de la culture de Herat, Ahmadullah Muttaqi, déplorait : « Beaucoup de nos monuments ont été endommagés. Malheureusement, notre gouvernement ne dispose pas du budget nécessaire à la restauration de ces sites. Ces zones culturelles n’appartiennent pas seulement à l’Afghanistan, mais au monde entier. Nous demandons aux organisations étrangères et aux ONG de travailler avec nous pour restaurer et préserver nos sites patrimoniaux. Il s’agit d’une responsabilité partagée entre nous et eux. »
De son côté, Jalil Rayan de l’ACHCO reste très pessimiste quant à la perspective de collaborations avec des ONG ou d’autres pays. « Malheureusement, en raison de la situation politique, il n’y a pas beaucoup de donateurs qui souhaitent travailler avec nous en Afghanistan. Nous travaillons très dur et dans des conditions très difficiles pour sauver ces sites du patrimoine, mais il n’y a pas de budget pour les entretenir ou, s’il y a des dégâts, comme c’est le cas actuellement, il n’y a pas de budget pour aider à les restaurer. Cela nous brise vraiment le cœur », affirmait-il au média.
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