Au Royaume-Uni, un retable du XVIe siècle réuni grâce à une guide bénévole

Dans le manoir de Compton Verney, une guide bénévole a réussi à réunir un mystérieux retable du XVIe siècle. Intriguée par l’œuvre incomplète, elle a effectué près de 15 ans de recherches pour retrouver la partie manquante, alors exposée en Ecosse.

Maître Franconien, La Lamentation du Christ, 1527 (Crédit : Galerie Nationale d'Ecosse)
Maître Franconien, La Lamentation du Christ, 1527 (Crédit : Galerie Nationale d’Ecosse)

Le manoir de Compton Verney, dans le Warwickshire, est l’une des galeries d’art les plus populaires du pays. Possédant une riche variété de peintures, de bronzes et de sculpture, l’institution est considérée comme l’une des plus grandes collections d’art populaire du Royaume-Uni.

Parmi ces nombreuses œuvres, c’est toutefois une paire de panneaux du XVIe siècle qui a immédiatement intrigué la guide bénévole Christine Cluley. Ces panneaux faisaient autrefois partie d’un retable et entouraient une scène de lamentation. Cependant, rien n’indiquait clairement leur provenance, ni même le peintre à l’origine de ces tableaux, sobrement nommé « Maître franconien ». Pendant près de 15 ans, Mme Cluley s’est donc attelée à rechercher la pièce manquante du retable, afin de réunir l’œuvre originale.

Ses recherches se sont d’abord dirigées vers la Bavière, en référence au nom de l’artiste. En effet, au XVIe siècle, la Franconie était une région du sud-est de l’Allemagne, qui a ensuite été annexée à la Bavière. Petit à petit, Mme Cluley a tenté de retracer l’origine du retable et la véritable identité de son créateur. A travers divers catalogues de ventes aux enchères et archives, elle a finalement identifié la pièce manquante de l’œuvre : La Lamentation du Christ, alors conservée à la Galerie Nationale d’Ecosse.

Dans les années 1800, les panneaux du retable sont entrés dans une vente aux enchères, après la mort d’un maître de poste prussien. Par la suite, le retable se serait retrouvé dans une demeure anglaise, dans les années 1920, puis dans l’église d’un village du Shropshire. Enfin, en 1993, les différentes pièces de l’œuvre ont été séparées et vendues aux enchères.

« Depuis plusieurs années, nous avions l’ambition de réunir les ailes de notre collection avec le panneau central », affirmait Compton Verney dans un communiqué. « Nous possédons un certain nombre de fragments de retables et nous avons pu les réunir dans une seule pièce. » Dans sa déclaration, l’institution suggère également l’identité du créateur du retable, parmi deux artistes bavarois : Wolfgang Traut et Hans Baldung.

En 2024, les trois panneaux du retable sont réunis après près de 30 ans de séparation. Les visiteurs de Compton Verney pourront d’ailleurs les découvrir dans une exposition temporaire jusqu’au 28 février 2025.

Une histoire de séparation et de réunion

D’après les recherches de Mme Cluley, les panneaux auraient été commandés en 1527, après la mort de Kasimir Friedrich. Cet aristocrate régnait alors sur sa principauté natale, Ansbach [NDLR : ville-arrondissement de Bavière], dans le Saint Empire Romain Germanique. Les pièces latérales du retable sont peintes des deux côtés : Saint Christophe et Saint Georges à l’intérieur, Sainte Catherine et Sainte Barbe à l’extérieur. Cependant, le panneau représentant Sainte Catherine est datée de 1519, avant la commande du retable. Cela suggère que les pièces latérales appartenaient à une autre œuvre, avant d’être réduites et réunies à la Lamentation du Christ.

Les deux saints peints à l’intérieur du retable sont liés à l’histoire de Kasimir Friedrich : Saint Christophe, patron des voyageurs, puisque l’aristocrate est mort lors d’un voyage ; Saint Georges, en référence au nom de son frère et successeur. Au centre du retable, la pièce maîtresse est particulièrement colorée et dynamique. Elle représente le moment où Jésus a été retiré de la Croix. Les donateurs, autour du Christ, se trouvent également à côté du cercueil de Kasimir Friedrich et portent les insignes de l’Ordre du Cygne, prisé par l’aristocratie franconienne de l’époque.


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