En Egypte antique, l’embaumement des défunts se faisait généralement à l’aide de cire d’abeille, de graisses animales et d’huiles végétales. Ces substances courantes étaient parfois combinées à d’autres produits locaux lors de la momification, selon le statut de l’individu. Néanmoins, de nouvelles analyses révèlent que les Egyptiens se procuraient également des ingrédients exotiques afin d’accompagner leurs morts dans l’au-delà.
En étudiant la momie de Senetnay, une femme noble et nourrice du pharaon Amenhotep II au XVe siècle avant notre ère, les archéologues ont procédé à de nouvelles analyses sur les techniques d’embaumement égyptienne. A côté de la momie de Senetnay – découverte en 1 900 dans la Vallée des rois – se trouvait quatre jarres contenant ses organes, toutes scellées par un couvercle en forme de tête humaine. Deux d’entre elles sont d’ailleurs exposées au Musée August Ketsner, en Allemagne. A travers les siècles, les organes de la nourrice se sont évidemment dégradés, mais les scientifiques ont fait plusieurs prélèvements dans les jarres en grattant les résidus de la poterie. Ils ont ensuite analysé les échantillons et découverts un mélange d’ingrédients jusqu’alors inédit pour l’Egypte antique. En effet, plusieurs substances présentent dans les prélèvements ne sont pas originaires de la région.
« Bon nombre des ingrédients utilisés étaient inhabituels pour cette région, car ils n’étaient pas facilement disponibles dans l’Égypte ancienne », a déclaré Barbara Huber – l’auteur principal de l’étude et chercheuse en doctorat de géoanthropologie – à la revue Live Science. « Ils ont très probablement acquis ces ingrédients par le biais de réseaux commerciaux. » Comme pour la plupart des momies, les baumes utilisés pour Senetnay contenaient des graisses animales, de la cire d’abeille et des huiles végétales. Toutefois, le mélange ayant servi à l’embaumement incluait également de la coumarine et de l’acide benzoïque. Présente dans les pois et les canneliers, la coumarine est un parfum comparable à la vanille. De son côté, l’acide benzoïque se trouve plutôt dans les gommes et les résines des plantes de type balsamique. Les analyses ont également dévoilé la présence de larixol, une résine présente dans les mélèzes, ainsi que du dammar, une gomme parfumée issue du bois de Pistacia. Contrairement aux autres ingrédients utilisés habituellement pour l’embaumement, ces quatre substances exotiques ne pouvaient pas être recueillies dans l’Egypte ancienne à cette époque. On trouve notamment des mélèzes en Europe et des pistachiers en Asie du Sud-Est.
En deçà de leur parfum remarquable, ces substances présentent également de nombreuses propriétés intéressantes pour la momification. Dans un article du Live Science, Barbara Huber explique d’ailleurs que « le mélèze possède de nombreuses propriétés bioactives et est antibactérien et antimicrobien. De plus, il dégage une forte odeur qui peut aider à masquer la décomposition et à éloigner les insectes. Il est également utile pour préserver le corps dans l’au-delà, où il peut rester pour l’éternité. Les anciens Égyptiens pensaient que l’âme ne pouvait revenir que si le corps était intact ». D’après les scientifiques, les ingrédients ont été dosés différemment dans les deux jarres étudiées, mais cela pourrait simplement être dû à un mélange inégal des baumes.
Ces nouveaux éléments ont permis aux chercheurs de dresser une liste plus précise des ingrédients utilisés pour la momification en Egypte ancienne. Ainsi, par le biais de la rétro-ingénierie, ces mélanges seront présentés au musée Moesgaard au Danemark dès le mois d’octobre, dans une exposition nommée « L’Egypte obsédée par la vie ». Selon Barbara Huber, « les visiteurs pourront découvrir l’odeur ambiante de la momification et voyager dans le passé, dans un ancien atelier d’embaumement ».
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