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Un musée de la Censure… et pourquoi pas ?

Le Musée de l’Art interdit a récemment ouvert ses portes à Barcelone, pour le plus grand plaisir des esprits rebelles et des curieux. Ce lieu unique présente plus d’une quarantaine d’œuvres des XXe et XXIe siècles, qui ont été censurées pour des raisons politiques, sociales ou religieuses. Plusieurs créations sont d’ailleurs signées par des maîtres, tels que Picasso, Banksy, Warhol ou Klimt.


Photographie de l'Oeuvre "Silence rouge et bleu", au Musée de l'Art Prohibit, Barcelone
Zoulikha Bouabdellah, Silence rouge et bleu, 2015, Musée de l'Art interdit, Barcelone.

« Attention ! Certaines des œuvres exposées au musée peuvent causer un malaise. »


C’est ce que l’on peut lire lorsque l’on veut entrer dans le Musée de l’Art interdit, à Barcelone, ou musée de la censure. Ce projet inédit a été pensé par le journaliste et collectionneur espagnol Tatxo Benet, qui espère ainsi prôner « le triomphe de la liberté d’expression ». Son musée compte ainsi de nombreuses œuvres qui peuvent aisément irriter ou choquer les publics les plus sensibles, puisqu’elles ont été censurées par le passé. On peut notamment observer les nus homoérotiques de Robert Mapplethorpe, ou encore la photographie controversée d’Andres Serrano, Piss Christ (1987). La plupart des créations présentées dans le musée remettent en question le christianisme et l’islam, mais également certaines opinions politiques ou sociales.


« Dans le musée, on ne montre pas des œuvres scandaleuses ou polémiques, on montre des œuvres qui ont été censurées, agressées, violentées, interdites. Ce sont des œuvres qui ont une histoire. Sans cette histoire, elles ne seraient pas là », expliquait Tatxo Benet au Parisien, début novembre. « Un artiste qui ne peut montrer son œuvre parce que quelqu’un l’en empêche est un artiste censuré, ce qui lui vaudra toujours une place dans ce musée. […] Le fait d’avoir des œuvres différentes côte à côte augmente la tolérance du spectateur, et le niveau de scandale de l’œuvre est diminué », ajoutait-il. De la même manière, le collectionneur affirme ne pas craindre les représailles quant à son musée et aux œuvres qu’il présente.


Un attrait naturel pour la censure et l’interdit

La création du Musée de l’Art interdit n’est pas un hasard pour le journaliste Tatxo Benet. En effet, cet homme d’affaires collectionne les œuvres censurées depuis 2018. A l’époque, il a acheté Prisonniers politiques dans l’Espagne contemporaine (2018), de Santiago Sierra, une création retirée de l’ARCO, la foire d’art contemporain de Madrid. Cette œuvre présentait des photographies de 24 indépendantistes catalans ayant enfreint la loi, ce qui avait engendré une polémique.


Plus tard, Tatxo Benet s’est procuré Silence Rouge et Bleu (2015), une œuvre de l’artiste franco-algérienne Zoulikha Bouabdellah. Il s’agissait, cette fois, d’une mise en place de trente tapis de prière musulmans, sur lesquels trônaient des paires de chaussures à talons. L’œuvre devait être exposée dans les Hauts-de-Seine en 2015, mais elle avait été menacée par une association musulmane locale. L’artiste avait ainsi alors préféré retirer son œuvre par peur de représailles. Cependant, c’est l’acquisition de cette œuvre emblématique qui aurait encouragé Tatxo Benet à créer le musée de l’Art interdit. Silence Rouge et Bleu y est d’ailleurs exposé dans une salle dédiée.


Dans ce musée de la Censure, l’artiste mexicain Fabián Cháirez a également eu le plaisir de retrouver l’une de ses œuvres, La Révolution (2020). Ce tableau met en scène le leader révolutionnaire du XXe siècle Emiliano Zapata sur un cheval, dans une posture efféminée, et ne portant qu’un sombrero rose. La peinture avait évidemment créé un scandale lors de son exposition au Palais des Beaux-Arts de Mexico en 2019. « Cette œuvre a beaucoup compté dans ma carrière », affirmait l’artiste en retrouvant sa toile dans le musée de Tatxo Benet.


Actuellement, le Musée de l’Art interdit ne présente que 42 des 200 œuvres censurées que possède le journaliste et homme d’affaires espagnol. Néanmoins, il espère pouvoir dévoiler, au fil du temps, le reste de sa collection des plus originales.


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