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Modigliani et Paul Guillaume, une amitié phare au Musée de l’Orangerie

Le Musée de l’Orangerie possède dans ses collections cinq chefs-d’œuvre du peintre italien arrivé à Paris en 1906, Amadeo Modigliani (1884-1920). Leur point commun ? Ils sont tous passés entre les mains du marchand d’art Paul Guillaume (1891-1934), qui a joué un rôle décisif dans la carrière du peintre bohème. Voilà une entrée originale dans l’œuvre de cette icône de l’avant-garde !

Portrait de Paul Guillaume de l'exposition Modigliani
Amadeo Modigliani, Portrait de Paul Guillaume, 1916, exposition Modigliani au Musée de l'Orangerie jusqu'au 15 janvier 2024

A travers une sélection de portraits, de dessins et de sculptures, l’exposition du Musée de l’Orangerie, à Paris, jusqu’au 15 janvier 2024, révèle l’influence de ce lien privilégié sur le style et la carrière de l’artiste, ainsi que sur l’histoire de l’art moderne à Paris. Les commissaires, Cécile Girardeau, conservatrice du musée, et Simonetta Fraquelli, commissaire indépendante et historienne de l’art, montrent en quoi la collaboration avec Paul Guillaume a contribué à la notoriété de l’artiste italien et, chemin faisant, à son succès commercial, surtout posthume.


Né en 1884 à Livourne, dans une famille juive séfarade désargentée et cultivée, Modigliani arrive à Paris en 1906, attiré par la capitale de l’art moderne. Ses premières toiles, à la croisée des courants (La Juive, exposé au Salon des indépendants en 1908, emprunte à la fois à l’expressionnisme de Munch, la palette d’un Picasso période bleue et au trait assuré de Toulouse-Lautrec), lui valent l’admiration du médecin Paul Alexandre, ami et mécène qui l’introduira dans sa colonie d’artistes montmartroise de la rue Delta. C’est ici que l’italien fait la connaissance de Constantin Brancusi, qui lui offre de partager son atelier, l’entraînant dans l’épure de visages hiératiques, que l’art d’Afrique motive et façonne.


Une amitié phare

En 1914, Modigliani rencontre Paul Guillaume par l’entremise du poète Max Jacob. Une rencontre qui marque une rupture pour l’artiste qui arrête la sculpture et se met à peindre la figure humaine exclusivement, avec un style figuratif abstrait reconnaissable entre tous.


Bien que petite en taille, l’exposition est le récit passionnant de cette relation fructueuse. Pendant vingt ans, le marchand défend l’artiste italien, lui présente le tout-Paris littéraire et artistique, l’expose aux côtés de Picasso, Renoir ou Cézanne, et lui montre sa collection d’œuvres d’art non occidental qui va inspirer Modigliani. Toutes les œuvres montrées dans l’exposition du Musée de l’Orangerie ont été vendues par Paul Guillaume ou commentées par lui dans sa revue Les Arts à Paris.


Cette relation privilégiée est mise en valeur à travers une série de portraits de Paul Guillaume, peints et dessinés par Modigliani entre 1915 et 1916. Ces portraits témoignent de la complicité entre le peintre et son marchand, mais aussi de l’évolution du style de Modigliani, qui simplifie et stylise les formes, allonge les visages et les cous, creuse les yeux et les narines, et utilise une palette de couleurs chaudes et contrastées.


Si le choix d’un angle si resserré sur l’œuvre de l’artiste se justifie complètement, on reste tout de même un peu sur notre faim à l’issue de l’exposition.


Modigliani, entre singularité et uniformité

Manifestement, le style de Modigliani diffère selon qu’il représente des hommes ou des femmes. Dans ses portraits masculins, il conserve une certaine fidélité au modèle (Portrait de Moïse Kisling, 1915). Chez les femmes, en revanche, il a adopté une formule plus stéréotypée. Visage ovale, cou d’une longueur démesurée, épaules affaissées, yeux en forme d’amande sans pupille, remplacée par des taches bleues, violettes ou vertes, tout semble obéir à un même canevas. Perfection ou mièvrerie, raffinement ou kitsch, modernité ou classicisme, on retrouve la même tendance avec le nu féminin, dont un exemple célèbre est exposé à l’Orangerie (Nu couché, 1917).



Modigliani appartient à ces artistes qui ont du charme. Mais il faut reconnaître, comme l’a fait Jean Cocteau, que « ses modèles finissaient par tous se ressembler, à la manière des jeunes filles de Renoir ». C’est là, le paradoxe du peintre italien. Son sujet presque exclusif, la figure humaine, dégage une attraction qui assure sa popularité. Mais, il semble que l’artiste, une fois son style défini, l’applique sans relâche, avec une certaine répétition.

Amedeo Modigliani. Un peintre et son marchand

Du 20 septembre 2023 au 15 janvier 2024,

Musée de l’Orangerie, Jardin des Tuileries, 75 001 Paris.

www.musee-orangerie.fr


Tête d'affiche de l'exposition Modigliani
Amadeo Modigliani, Elvire assise, accoudée à une table, 1919

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