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Fin de la coopération culturelle France-Afrique ?

La décision du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères de suspendre tous les projets de coopération avec des artistes du Mali, du Niger et du Burkina Faso, annoncée le 14 septembre, a provoqué un tollé dans le monde culturel français. Face à la mobilisation des artistes et des professionnels du secteur, le président Emmanuel Macron a démenti cette mesure et affirmé que la France continuerait à accueillir les créateurs du Sahel.

AKAA Fair
Photo de la 7ème édition de la foire d'art contemporain AKAA, 2022. © Xavier Randria

Le 14 septembre, un courrier envoyé par la Direction générale des affaires culturelles (DRAC) aux structures culturelles françaises qui travaillent avec des artistes du Mali, du Niger et du Burkina Faso a semé la stupeur. « A compter de ce jour la France ne délivre plus de visas pour les ressortissants de ces trois pays sans aucune exception, et ce jusqu’à nouvel ordre », indique la directive qui fait suite à l’instruction du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Cette décision intervient dans un contexte de tensions diplomatiques entre la France et ces trois pays du Sahel, où la présence militaire française est contestée par une partie de la population et des autorités.


La réaction du milieu culturel ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué de presse commun, différents syndicats (Syndeac, Accn, A-CDCN, ACDN et ASN) ont dénoncé « ce message inédit par sa forme et sa tonalité » qui n’a « aucun sens d’un point de vue artistique ». « Cette politique de l’interdiction de la circulation des artistes et de leurs oeuvres n’a jamais prévalu dans aucune autre crise internationale, des plus récentes avec la Russie, aux plus anciennes et durables, avec la Chine », ont-ils souligné.


D’autres acteurs culturels ont exprimé leur indignation et leur incompréhension face à cette mesure qui met en péril leurs projets de coopération avec les artistes du Sahel. Victoria Mann, directrice-fondatrice de la foire AKAA, dédiée aux scènes plastiques africaines qui a lieu en octobre pendant Paris+, a déclaré qu’il est « désolant, indigne et lâche de voir les artistes pris en otage », même si « les artistes de ces pays attendus physiquement à la foire sont en mesure de voyager, ayant déjà eu leur visa ».

Nyaba Ouedraogo et Christophe Person, co-fondateurs de la Biennale internationale de sculpture de Ouagadougou (BISO), qui se tient du 4 au 31 octobre au Burkina Faso se sont également indignés. « Alors que les résidences de la BISO battent leur plein en prévision du vernissage le 4 octobre, si le Burkina mettait en place des mesures de réciprocité et que les visiteurs de France notamment ne pouvaient obtenir de visa, cela serait catastrophique pour les artistes qui ont besoin que le public, les collectionneurs, les médias voient leurs œuvres pour rayonner sur le marché international. »


Face à la vague d’indignation, le gouvernement français a tenté de calmer le jeu. La ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, a assuré le lendemain qu’il n’y aurait « aucune déprogrammation d’artistes, de quelque nationalité que ce soit », ajoutant que « cette décision n’affecte pas les personnes qui seraient titulaires de visas délivrés avant cette date ou qui résident en France ou dans d’autres pays ».


Emmanuel Macron est allé plus loin en contredisant la directive : « Lorsqu’on dit qu’il n’y aura pas de visa ou qu’on annule tous les événements qui seraient faits en France avec tous les artistes venant du Burkina Faso, du Mali ou du Niger : c’est faux, ça ne se passera pas », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse à l’issue d’un sommet européen à Bruxelles. « La vocation de la France, c’est d’accueillir les artistes, les intellectuels et de pouvoir justement les faire rayonner en toute liberté », a-t-il ajouté.


Beaucoup pointent du doigt : quoiqu'il en soit, les visas sont aujourd'hui inaccessibles pour de nombreux artistes d'Afrique de l'Ouest. Pourtant, il y a quelques mois, Emmanuel Macron assurait lors d'une tournée en Afrique que la culture allait être placée au centre des relations entre la France et le continent.

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